«J’ai hérité d’une très belle collection de cartes de hockey
des années 90 et je me demande quelle est sa valeur », m’écrivent parfois des
lecteurs. Malheureusement, je n’ai que de mauvaises nouvelles comme réponses.
Pour comprendre, il faut expliquer une erreur majeure des fabricants de cartes
de hockey dans les années 1990.
La grande débâcle
Les amateurs ont soudainement réalisé que les vieilles
cartes qui traînaient au fond d’un placard pouvaient leur rapporter un joli
pactole. Et le marché s’est emballé.
Les fabricants de cartes sportives ont flairé la bonne
affaire. De nouvelles compagnies sont nées, d’anciennes ont repris du service
et les séries de cartes se sont multipliées, provoquant une débâcle totale du
marché.
Presser le citron à l’extrême
Sûrs de faire un placement béton, les amateurs se sont
procurés des séries complètes à prix fort, mais l’avidité des fabricants a
dépassé leur capacité de payer. Les fabricants produisaient de plus en plus de séries en quantité
industrielle, dépassant largement le point de saturation du marché. Ainsi, les
collectionneurs retrouvaient les surplus de ces mêmes séries en solde quelques
mois plus tard. Frustrés, ils sont devenus prudents.
La grenouille et le bœuf, version hockey
Le pire exemple de cette stratégie marketing abusive et sans
lendemain a été celle de la compagnie Pro Set.
Pro Set détenait les droits de production de cartes de la
NFL en 1989 et elle a étendu son empire au hockey en lançant son premier
ensemble de cartes de la LNH en 1990-1991. L’entreprise ne manquait pas
d’ambition et le produit était loin d’être vilain, mais la surproduction a
provoqué la chute du fabricant. On retrouvait même des boîtes entières de Pro
Set en solde sur les étals de Jean Coutu dix ans plus tard.
Au final, Pro Set n’aura produit de cartes de hockey que
durant deux saisons de la LNH. En août 1992, la compagnie a fait faillite,
laissant un très mauvais souvenirs aux collectionneurs malgré le fait qu’il
s’agissait d’un des plus bel ensemble de cartes de hockey de l’époque (design
simple, percutant et élégant et une excellente qualité de production).
Aujourd’hui, la valeur d’une série complète en parfaite
qualité de ces cartes est de «zéro moins une barre». Seuls quelques amateurs
novices s’aventurent à acheter ces ensembles pour quelques dollars, question de
s’amuser. On les obtient pour moins que la valeur du cartable et des feuilles
de plastique qui les contiennent.
Pro Set n’est pas la seule responsable de la débâcle des
années 1990, mais elle y a largement contribué. Toutes les séries de cette
décennie ont une valeur pratiquement nulle à cause de la cupidité des fabricants
et de la LNH. Ce crash a donné une leçon à la ligue qui a réagi en
sélectionnant minutieusement ses partenaires. Elle octroie présentement
l’exclusivité des droits de production de cartes de hockey à Upper Deck et lui
impose une quantité restreinte d’ensembles annuels (12 aux dernières
nouvelles).
L’industrie entière a dû se réinventer. Les collectionneurs
achètent maintenant un paquet de cartes comme s’ils jouaient à la loterie. Peu
cherchent à compléter un ensemble. Les collectionneurs recherchent plutôt la
pièce rare incluse dans une quantité infime de paquets; le bout de tissu, de
bâton, de patin ou l’autographe d’une légende ou d’une recrue hautement cotée.
Plus le paquet est cher, plus les pièces rares promettent un
trésor fabuleux. Le problème de ces cartes est que leur valeur tend rarement à
monter, contrairement aux cartes vintage. Si un acheteur hurle de plaisir à
découvrir une carte rare autographiée par une recrue en vogue, il y a de fortes
chances qu’il ait tout intérêt à la revendre immédiatement. Pas certain qu’une
carte autographiée de Nail Yakupov vaille autant maintenant qu’à sa saison
recrue. Alors à quoi bon collectionner si on doit revendre l’objet
immédiatement qu’on vient d’acquérir?
En bref, le crash de 1992 a tout changé. Et,
malheureusement, vos cartes des années 1990 trouveront difficilement preneur,
même à un prix dérisoire. Peu de marchands oseront même vous faire une offre.
Pour m'écrire: arivest@lapresse.ca
Pour m'écrire: arivest@lapresse.ca
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